Étienne Davodeau : Les mauvaises gens

mardi 11 juillet 2006, par Bernard Massip

Delcourt, 2005

Dans ce beau récit en bandes dessinées Étienne Davodeau est parti à la rencontre de la mémoire familiale. Il y met en scène de façon remarquable le présent de sa propre quête auprès de ses parents jeunes retraités et l’histoire de ceux-ci, de leur petite enfance à la Libération jusqu’à la victoire de François Mitterrand en 1981.

Marie-Jo et Maurice Davodeau sont tous deux issus de milieux populaires, ils sont nés dans deux villages voisins, dans les Mauges, région catholique et rurale à proximité de Cholet, ils ont été éduqués à l’école religieuse, ils sont actifs dans les patronages, deviennent ouvriers, participent au mouvement de la jeunesse ouvrière chrétienne grâce à laquelle ils se rencontrent. Ils deviennent ensuite actifs militants de l’action catholique ouvrière, deviennent syndicalistes et délégués dans leurs entreprises. Maurice passe ensuite des concours, il devient professeur de l’enseignement technique et prend des responsabilités locales dans le parti socialiste d’après Épinay.

Le parcours des parents Davodeau apparaît emblématique de l’évolution des mentalités dans des terres a priori très rétives au changement dans le contexte des transformations sociales et économiques qui marquent la 2e moitié du 20e siècle. Le récit très documenté qu’en fait leur fils, appuyé par des rencontres avec de nombreux autres acteurs, par des plongées dans la presse locale de l’époque et dans les archives syndicales dépasse donc largement le seul intérêt de l’histoire individuelle.

Étienne qui se représente dans la fin du récit en petit garçon enfant de militants puis en adolescent à la scolarité un peu chaotique est présent parmi les siens au moment où sur le téléviseur apparaît le visage du nouveau président de la république. On perçoit bien alors que le sens profond de son récit est aussi ce témoignage de reconnaissance et d’admiration qu’il veut porter à ses parents : « J’ai grandi parmi ces gens modérés et intègres, ce livre est pour eux » note-t-il sur ces dernières images.